Je le tenais fermement,
moi, l’auteur de son vol
au-dessus du jardin
et pourtant,
sous l’effet du souffle
du vent,
son fil s’est enfui
de mes mains
et je l’ai vu flottant
dans les airs
comme une corolle
détachée de la terre.
Longtemps, il a vogué
sur un rayon
de lumière
avant de disparaître
dans un point frêle,
le cerf-volant
de mon enfance.
En vain,
je suis partie en quête
de l’endroit
où il aurait bien pu
se poser.
J’ai fouillé
entre les feuilles,
écarté
les herbes folles,
battu
avec mon bâton
de coudrier
buissons et fourrés.
Sans succès.
Je savais le pouvoir
de la parole
pour faire revenir
ce qui semble
à jamais
perdu.
Alors, je suis montée
dans ma chambre
et avec mon encre
merveilleuse
j’ai recréé
sous forme
de poème
mon cerf-volant
aimé.
J’ai imaginé
qu’il m’était rendu,
tout constellé
de la rosée
de l’aube
avec laquelle
il avait dansé
et m’offrant
des paillettes
d’étoiles
encore allumées
à la jointure de ses ailes.
Dans le rêve
ininterrompu
d’une poésie,
j’ai retracé
son voyage
au-dessus du monde
qui ressemblait
à notre jardin.
Le lendemain matin,
j’ai retrouvé
mon cerf-volant
disloqué
sur les tendres feuilles
du laurier,
pauvre oiseau
fragile
qui s’était brisé
dans son exil
face à une force
plus grande que lui.
Mais ce n’en était pas fini
de son vol
car là-haut
dans ma chambre,
son âme
avait ressuscité
en ce poème
suspendu,
ailes ouvertes,
pour l’éternité
dans le ciel
du papier
et auquel le fil
de mon encre
m’avait attachée
pour que tous
les enfants
qui cherchent
sur cette terre
leur cerf-volant
continuent
à croire
au retour
des rêves emportés.
Géraldine Andrée