Archives mensuelles : mars 2018

J’entends un pas

J’entends

un pas

dans le couloir

de la mémoire

 

C’est sans doute

Georges

qui rentre

de l’usine

 

et qui s’apprête

à s’asseoir

sous la lumière

du soir

 

pour boire

l’alcool

aux reflets

d’or

 

Mais il est

déjà tard

et je crois

que Georges

 

revient

de l’autre

côté

des jours

 

les lueurs

des abeilles

sont éternelles

sur les roses-thé

 

pour m’annoncer

que tous ceux

qui semblent

s’être absentés

 

à jamais

du monde

existent

encore

 

et attendent

que mon pas

touche

le seuil

 

de la porte

tout au bout

du couloir

de la mémoire

 

Géraldine Andrée

Après-midi de pluie

La météo

l’a prédit

pour cette fin

d’après-midi :

 

la pluie

fouette

la fenêtre

et chaque note

 

crépite

au contact

de la vitre

puis éclate

 

en une goutte

de silence

à travers laquelle

on voit

 

le jardin

trempé,

son feuillage

ébouriffé,

 

les chaises

précipitamment

quittées

sous les branches

 

qui s’entrelacent

violemment…

Et je ne sais

qui des deux

 

se retourne

le premier

vers l’autre

et le regarde

 

dans les yeux,

ne disant rien,

seul dans ce songe

qui est le sien…

 

Géraldine Andrée

Encre

Encre

lait

bleu

dans lequel

l’univers

ajoute

ses silences

et ses étoiles

quand je m’assieds

à genoux

pour prendre

note

avec toute

l’attention

requise

du chatoiement

d’une aile

sur une brindille

 

Géraldine Andrée

Laisser les choses

Laisser les choses

aller là

où elles veulent

telles des feuilles

portées par le souffle

des jours

Géraldine Andrée

Rencontre

Voici
un peu 
de bleu
que le vent
ajoute 
aux senteurs
des menthes
comme si
une fenêtre
avait été
soudainement
ouverte
C’est arrivé
avant même
que j’y pense
Le rêve
a rencontré
ma vie

Géraldine Andrée

Comment entend-on l’appel de l’âme ?

Comment entend-on l’appel de l’âme ?

L’âme a une voix fluette comme le murmure de l’eau sous la terre…

Il fait vraiment tendre l’oreille pour comprendre son frêle message de feuille envoyée

par un souffle lointain.

Pourtant, qu’importe la destination de cet appel

qui chemine tant que dure la vie

et qui te montre,

même s’il est déjà tard,

la maison future,

le visage promis,

l’enfant qui décide de naître,

la fenêtre à ouvrir

pour que tu puisses te reconnaître.

Tel est l’appel de l’âme,

porte-parole

en un battement d’ailes

à l’aube

de choses justes et belles

qui insistent juste un instant de plus

pour exister.

 

Géraldine Andrée

Image : Alessandro Botticelli 1445-1510 ;

Vénus et les grâces offrant des présents à une jeune fille

Les enfants et la nuit

On veut protéger les enfants de la nuit en les couchant tôt.

Pourquoi ?

Pourquoi clore leurs paupières sur les points étincelants du vaste silence ?

Les enfants savent

par une originelle connaissance

que la nuit est présence.

En leur dérobant la beauté de ce mystère,

en remplaçant les étoiles par les lampes,

on rend nos enfants tristes et graves

avant même qu’ils n’aient grandi.

De grâce, laissons entrer dans leur chambre

le souffle de la nuit

destiné à se poser comme une brise qui luit

sur la fleur blanche

de leurs tempes !

 

Géraldine Andrée

Tous droits réservés@2018

 

La neige

La neige

a tout recouvert :

la table, les chaises,

les feuilles sèches

de la saison

passée,

et sur l’ancien sentier,

les billes

de nos rires

qui brillaient

encore

hier

de tous leurs

éclats

comme le coeur

des étoiles

feues.

J’espère,

lorsque la neige

fondra,

qu’on les retrouvera

peu à peu.

 

Géraldine Andrée