La vie apporte ses changements.
Il me faudra bientôt une nouvelle demeure.
Je la veux avec beaucoup de fenêtres, une terrasse où je verrai trembler le point d’or de tous les commencements, son silence unique où la moindre goutte se reflète en mille chants, beaucoup de douceur et de duvet, des fauteuils profonds, un chat sur le seuil, un couloir secrètement allumé où résonneront les pas de l’homme que j’aime, des lampes qui veilleront jusqu’à l’aube.
Une demeure pas très loin de la ville mais cachée derrière des arbres, entourée d’un jardin.
Une demeure ouverte aux amis et au ciel.
Une demeure avec son frêle sentier qui y mène et dont je verrai se métamorphoser les couleurs au fil des jours.
Une demeure où l’on entend ruisseler la paix venue d’une fontaine invisible.
Une demeure avec sa lucarne tout en haut du toit, par laquelle je contemplerai longtemps le clair de lune en buvant du vin.
Une demeure avec une immense bibliothèque et des tableaux du temps ancien.
Une demeure que l’on pourrait trouver dans un poème.
Une demeure qu’abrite un rêve d’enfance.
J’en ai habité une jadis qui lui ressemble : il y avait en supplément une vasque blanche dans une petite cour intérieure.
C’était, on m’a dit, dans une vie antérieure.
C’est pour cette raison que je suis si sensible aux fleurs à fleur d’eau et aux notes des oiseaux.
J’ai souvenance de cette demeure qui est la soeur
de celle de mon désir.
Mais je vis maintenant dans une autre époque.
Alors, si la vasque a disparu à cette nouvelle adresse, peu importe.
L’essentiel est que j’entre dans ma demeure
en m’exclamant
– Mais c’est mon coeur !
Géraldine Andrée